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Essentiels à notre quotidien, les systèmes spatiaux sont confrontés aux risques croissants de collision avec des débris. D’où la nécessité de surveiller l’espace, ce que font l’Esa et le Cnes, mais à partir de données américaines. Pour s'affranchir de cette dépendance, l’Esa veut mettre au point un réseau de surveillance. La Commission européenne financerait une partie de son fonctionnement.
Consciente des enjeux économiques liés aux dégâts que les débris spatiaux provoquent, la Commission européenne veut un système européen de surveillance de l’espace et de prévision des risques de collision spatiale. Pour y parvenir, la Commission souhaite aider les États membres de l’Union européenne à mettre en réseau leurs infrastructures existantes de surveillance du ciel dans le cadre du projet Space Surveillance and Tracking (SST), qui fait partie du programme préparatoire de surveillance spatiale de l’Esa (SSA, pour Space Situational Awareness). Pour cela, elle se dit prête à financer les coûts d'utilisation de ce programme à hauteur de dix millions d’euros par an.
On sait effectuer des corrections de trajectoire mais leur coût n’est pas nul : il est estimé à 140 millions d’euros chaque année et on s'attend à une dépense de 210 millions par an pendant la prochaine décennie. Un débris spatial n’a pas besoin d’être grand pour provoquer des dégâts significatifs. On estime qu’un objet de plus de 1 cm est suffisant pour endommager ou mettre hors service une partie d’un satellite, et qu’à lui seul, un débris d’environ 10 cm est suffisant pour en détruire un.
L’Esa manque d’outils de surveillance des débris spatiaux
Cependant, si l’Europe a suffisamment de centres de données, elle manque de moyens de surveillance, « notamment des radars capables de détecter des débris d’une dizaine de centimètres », explique Nicolas Bobrinsky, le responsable du programme SSA à l’Esa. Par exemple, bien que très puissant, le radar français Graves ne peut pas descendre en dessous de 70 centimètres.
Autre point noir, la surveillance du ciel s’appuie « pour l’essentiel sur des données fournies par les États-Unis », précise Fernand Alby, responsable des activités débris spatiaux et surveillance de l'espace au Cnes, un domaine dans lequel la France dispose d’une expertise reconnue. Concrètement, le Cnes « a mis en place des services opérationnels de surveillance des risques de collision et de prévision de rentrées atmosphériques ». Ils utilisent les bases de données et des alertes de collision envoyées par le réseau de surveillance américain Usstratcom. Si nécessaire, elles sont complétées « avec les données du radar français Graves, des radars de la DGA et de l’armée de l’air, ainsi que du radar allemand Tira ».
Deux types de radars à l'étude
À l’avenir, l’Europe veut son propre réseau de capteurs associant radars, télescopes et centres de traitement des données capables de détecter, suivre, corréler et mettre en catalogue tous les objets au-dessus d'une taille donnée pour une région orbitale donnée. Afin de choisir la technologie qu’elle utilisera pour son futur système de radars au sol, l’Esa finance le développement de deux prototypes de radar de surveillance « pour tester des techniques de suivi et d’observation des débris spatiaux ».
Le prototype sera réalisé avec la société espagnole Indra Espacio SA. Il utilisera la technologie monostatique : l’émission et la réception ont lieu au même endroit, et le rayonnement est émis sous la forme d’impulsions intermittentes. Quant au second prototype, il est réalisé avec l’Onera. Il s’agit d’un radar dit bistatique, dont l’émetteur et le récepteur sont séparés et dont le rayonnement est émis de façon continue.
Ces deux radars expérimentaux seront capables de détecter des objets de 80 à 100 cm et seront terminés en 2014. L’idée est d’« avoir validé le concept retenu avant la conférence ministérielle de 2016, de sorte que l’on présente aux ministres des États membres de l’Esa un projet solide avec des choix technologiques et industriels arrêtés ». Enfin, pour avoir une bonne couverture des orbites, la première urgence est de disposer d’un radar dans l'hémisphère sud, « à la Réunion ou en Polynésie, par exemple », souligne Fernand Alby. Les études du Cnes « nous ont convaincus que si l'on veut avoir une bonne surveillance de l’espace, en plus des moyens existants, il faut des capteurs à différents endroits ».
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