Salut
Pourquoi la vitesse des sondes Pioneer diminue-t-elle ? Astronomes et physiciens cogitent depuis des décennies sur ce mystère. La réponse serait finalement plus conventionnelle que ne le suggéraient certains physiciens, tenants d’une nouvelle physique pour expliquer cette anomalie.
Ceux qui misaient sur la trajectoire inattendue des sondes Pioneer pour poser les bases d’une nouvelle physique, détrônant Einstein et Newton, seront probablement déçus et mécontents des résultats publiés cette semaine au sujet de cette fameuse anomalie des sondes Pioneer 10 et 11. D’après les résultats obtenus par Slava Turyshev (JPL, Nasa), Viktor Toth et leurs collègues (Physical Review Letters), si ces deux voyageuses spatiales vont moins vite que prévu, c’est très probablement à cause d’un phénomène conventionnel, peut-être lié à la chaleur émise par les sondes.
Lancées en 1972 et 1973, les Pioneer ont poursuivi leur voyage après avoir rempli leur mission d’exploration de la ceinture principale d’astéroïdes, de Jupiter et de Saturne). Pioneer 10 a dépassé l’orbite de Pluton en 1983 et les sondes se trouvent aujourd’hui deux fois plus loin du Soleil que Pluton elle-même. Sur Terre, les signaux envoyés par les sondes ont été enregistrés pendant plus de 20 ans pour Pioneer 11, près de 30 ans pour Pioneer 10.
Découverte d'une anomalie
Dès les années 80, un écart entre la vitesse attendue des sondes et leur vitesse réelle a été mis en évidence par les calculs d’un chercheur américain, John Anderson. En 1998, rejoint par d’autres chercheurs dont Slava Turyshev, Anderson publiait un article présentant cette anomalie. Tandis que certains physiciens suggéraient qu’une mauvaise interprétation des données ou qu’un problème technique sur la sonde était la cause de l’anomalie, d’autres ont commencé à formuler des hypothèses audacieuses remettant en cause les lois de la gravité telles qu’elles sont connues, imaginant de nouvelles forces….
En 2002 un nouvel article cosigné par Turyshev écartait l’explication thermique. Les sondes Pioneer sont en effet équipées d’un générateur fonctionnant au plutonium qui transforme une partie de la chaleur en électricité. Le reste s’échappe de la sonde. Il suffit qu’une partie de cette chaleur se répande de façon irrégulière pour exercer une force sur la sonde et la faire ralentir. Sachant que la chaleur émise par le plutonium décroit au fil du temps, l’anomalie doit en faire autant. Or les calculs montrent qu’elle est constante. C’est l’une des raisons qui permettent aux chercheurs d’écarter cette explication en 2002. C’est pourtant bien celle-là qui revient en force aujourd’hui.
Logiciels oubliés, cartes perforées et carnets de notes
Que s’est-il passé depuis 2002 ? Turyshev et Toth ont mené un travail de fourmi pour exhumer une plus grande quantité de données afin d’étudier plus complètement cette question thermique. Les archives des sondes Pioneer étant stockées sur des formats informatiques obsolètes –allant jusqu’aux cartes perforées- le traitement des archives a demandé de longues années de travail. Y compris la récupération de carnets de notes conservés par des retraités du centre de recherches Ames de la Nasa. Pour affiner au maximum les calculs, les chercheurs ont même vérifié l’évolution de la position des antennes de réception des signaux sous l’effet des séismes.
Après plus de six ans de travail, la conclusion est claire pour les chercheurs : l’anomalie des sondes Pioneer est de 2.10-11 mètre par seconde au carré par an mais elle n’est pas constante, elle décroit légèrement. De plus, Slava Turyshev et Viktor Toth remettent en cause le fait que cette décélération soit orientée vers le Soleil plutôt que vers la Terre. Ces résultats écartent les explications les plus audacieuses de l’anomalie des Pioneer au bénéfice d’un phénomène plus classique. L’explication thermique pourrait ainsi la bonne, après tout.
http://www.sciencesetavenir.fr/actualite/espace/20110822.OBS8943/le-mystere-des-sondes-pioneer-s-eclaircit.html