Jeanne Favret-Saada (Tunisie, 1934) est une ethnologue française.
Après une agrégation de philosophie obtenue à Paris, elle enseigne à l'Université d'Alger de 1959 à 1963. Elle y étudie les systèmes politiques dans les tribus arabes et la violence en Kabylie.
Elle enseigne ensuite à l'Université de Nanterre. Dans les années 1970, elle s'intéresse à la sorcellerie paysanne dans le bocage normand. Ses recherches sur le terrain l'absorbent plus qu'elle ne s'y attendait, et elle y consacre trois ans. Elle rédige l'étude de son expérience, Les Mots, la mort, les sorts (1977), qui dévoile la complexité du système d'ensorcellement et de désorcellement.
Ces recherches l'ont aussi amenée à travailler à la pratique psychanalytique avec Josée Contreras, afin de comprendre le fonctionnement psychologique de la sorcellerie sur les personnes qui y sont impliquées (Corps pour corps, 1981). Elle s'intéresse ainsi à une ethnologie des thérapies.
Dans les années 1990, ses travaux portent sur les accusations de blasphèmes contemporains (par exemple sur la fatwa contre Salman Rushdie). Elle était directrice d'études à l'École pratique des hautes études (sciences religieuses). Elle fait partie du comité de lecture de la revue Prochoix.
En 2004, elle fait paraître, en collaboration avec Josée Contreras, Le Christianisme et ses juifs, 1800-2000, qui, à partir de l'analyse de représentations traditionnelles de la Passion en Bavière au XIXe siècle, étudie l'image des Juifs dans le catholicisme et dans l'histoire.
En 2007, Jeanne Favret-Saada publie Comment produire une crise mondiale avec douze petits dessins. Ce livre est le fruit d'une enquête sur l'affaire dite des "Caricatures de Mahomet du journal Jyllands-Posten", que l'ethnologue a menée, entre autres, dans son lieu d'origine, le Danemark, où elle a rencontré plusieurs protagonistes du conflit.
En 2009, l'anthropologue, qui avait annoncé en 1977 une suite à son ouvrage Les mots, la mort, les sorts, publie Désorceler. Reprenant les matériaux sur la sorcellerie dans le Bocage qu'elle avait collectés, elle montre notamment comment l'action d'un désorceleur peut être qualifiée de thérapie du collectif familial des exploitants d'une ferme ; elle analyse aussi comment une désorceleuse, Madame Flora, a inventé un dispositif thérapeutique à partir du jeu de tarots de mademoiselle Lenormand. Elle propose enfin de reconsidérer la notion d'affect pour repenser l'anthropologie des thérapies, et plus largement l'anthropologie.
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