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Une course scientifique est engagée pour redéfinir le kilogramme sans dépendre d’un étalon matériel. Deux méthodes sont en lice mais de subtils écarts demeurent dans les résultats.
Le kilogramme est la dernière unité du système international de mesures définie par un objet matériel. Un cylindre composé de 90% de platine et de 10% d’iridium conservé sous sa cloche de verre comme un bel objet de collection, dans un coffre-fort du Bureau international des poids et mesures, à Sèvres, près de Paris. Cependant ce cylindre de métal n’est plus stable, sa masse varie d’environ 0,5 microgramme par an par rapport aux copies de référence. Les raisons de cette variation ne sont pas claires mais la conclusion est simple : il faut une nouvelle mesure dématérialisée.
Passé cet accord de principe, les choses se corsent. Lors d’une conférence qui s’est tenue fin janvier à Londres, les résultats de deux expériences concurrentes ont été de nouveaux discutés. Il subsiste des écarts qui risquent de repousser encore le choix définitif d’une nouvelle mesure.
Constantes de la physique
L’objectif est de redéfinir le kilogramme en s’appuyant sur des constantes fondamentales de la physique. C’est ainsi que le mètre est désormais défini comme la distance parcourue par la lumière dans le vide en un temps donné (1/299792458 s). La seconde elle-même a été finie par rapport à une propriété de l’atome de césium 133.
Pour le kilogramme, deux constantes sont en concurrence : le nombre d’Avogadro, qui correspond au nombre d’atomes contenus dans une quantité donnée de matière ; la constante de Planck, utilisée en physique quantique, qui relie l’énergie et la fréquence d’une particule.
Sphère de silicium
Pour le nombre d’Avogadro, l’expérience en cours à laquelle participe des chercheurs français du BIPM, consiste à compter le nombre d’atomes contenu par une sphère de silicium très pur. Pour améliorer la finesse de leurs résultats, l’équipe coordonnée par l’Allemand Peter Becker a fait fabriquer une nouvelle sphère contenant à 99,99% le même isotope naturel de silicium (Si-28).
La sphère de silicium utilisée par le Projet Avogadro (National Physical Laboratory, GB)
A l’aide de l’interférométrie laser et des rayons X, les chercheurs vérifient la répartition des atomes et la distance qui les sépare. Dans un article publié récemment, cette équipe est parvenue à calculer le nombre d’Avogadro avec une incertitude de 3x10-8. Pour satisfaire aux exigences du Comité international des poids et mesures (CIPM), il leur faut atteindre 2x10-8.
Pour la constante de Planck, les chercheurs utilisent une «balance du watt» pour calculer la force électromagnétique qui équilibre une force mécanique (celle d’un kilogramme en l’occurrence).
Calculer une moyenne?
Les deux méthodes donnent des définitions légèrement différentes du kilogramme, contrairement aux attentes du CIPM. Le prochain congrès du comité a lieu en octobre prochain mais ce n’est qu’en 2015, lors du congrès suivant, que la redéfinition du kilogramme devrait être arrêtée.
Lors de la conférence organisée par la Royal Society les 24 et 25 janvier, un ancien directeur du BIPM, Richard Davis, a proposé que le nouveau standard soit calculé en réalisant une sorte de moyenne des deux résultats obtenus, rapporte la revue Nature. Une proposition qui ne fait pas l’unanimité. Les subtils écarts intervenant plusieurs chiffres après la virgule n’auront aucun impact sur le kilo de pommes acheté au quotidien ni sur la plupart des procédés industriels. Cependant il n’en va de même pour certaines mesures en physique qui exigent une très grande précision et qui dépendent du kilogramme, comme les forces par exemple.
http://www.sciencesetavenir.fr/actualite/fondamental/20110131.OBS7243/le-kilogramme-en-quete-d-un-nouvel-etalon.html