Salut
Une équipe européenne menée par des chercheurs du Laboratoire d'Astrophysique de Grenoble (LAOG) et du Centre de Recherche d'Astrophysique de Lyon (CRAL) a obtenu une image de la zone de formation de planètes autour de l'étoile jeune HD 163296 en utilisant le pouvoir de résolution exceptionnel du Very Large Telescope (ESO) en mode interférométrique, le VLTI. Ce résultat, qui est publié dans la revue Astronomy and Astrophysics, est présenté le mercredi 8 septembre 2010 à la conférence annuelle de la Société européenne d'Astronomie à Lisbonne dans la session « Science Cases for Optical and Infrared Interferometry ».
Les jeunes étoiles de masse similaire à celle du Soleil mais âgées d'environ un million d'annéessont entourées d'un disque de matière formé de gaz et de poussière, lieu éventuel de formation des planètes. Les grains de poussière du disque se collent les uns aux autres pour former des agrégats de plus grande taille qui vont à leur tour adhérer les uns aux autres. La croissance du corps protoplanétaire continue ainsi jusqu'à atteindre la masse et la taille d'une planète terrestre.
« Le pouvoir de résolution du VLTI permettant d'observer des détails minuscules nous a permis de sonder la région du disque située très près de l'étoile où nous nous attendions à ne pas voir de poussière à cause de la proximité de l'étoile. Et pourtant nos images nous ont révélé une structure en forme d'anneau à une distance de moitié celle qui sépare le Soleil et la Terre ainsi que la présence de poussière à l'intérieur », rapporte Stéphanie Renard du LAOG premier auteur de l'article.
Aucun télescope classique au monde n'a une acuité visuelle suffisante pour étudier le voisinage proche de ces astres distants. La taille de la région explorée par le VLTI correspond à 150 millions de kilomètres, c'est-à-dire à peu près la distance entre la Terre et le Soleil, mais à condition que cette zone soit située à 360 années-lumière de la Terre. Cela revient à étudier une carte routière à 40 kilomètres de distance.
Pour être capable d'un tel exploit, l'équipe d'astronomes a utilisé une technique appelée « interférométrie » qui permet de combiner simultanément la lumière provenant de plusieurs télescopes à la fois. Cela permet d'obtenir des informations équivalentes à celles qu'aurait collectées un télescope géant dont le diamètre correspondrait à la distance maximale des télescopes. Mais avec l'inconvénient majeur de ne pas avoir d'images ! Il faut alors utiliser des algorithmes mathématiques complexes pour reconstruire une image, qui cependant présente des détails qui vont bien plus loin que ce peut fournir un télescope classique.
Les données présentées dans ce travail proviennent de différentes combinaisons des quatre télescopes de 8,2m et des quatre télescopes de 1,8m constituant le VLTI de l'ESO situé au sommet du Paranal au Chili. Elles ont déjà été analysées en détail[3] un peu plus tôt cette année, mais pour la première fois l'équipe a été capable de reconstruire une image avec un minimum d'hypothèses grâce à un logiciel développé par Eric Thiébaut du CRAL. Les images qui ont été obtenues ont une résolution équivalente à celle que pourrait avoir un télescope de 130 mètres de diamètre, bien plus grand que ce qui existe actuellement. Pour améliorer encore la précision des images, l'équipe a intégré ces données avec celles d'autres interféromètres (CHARA, Keck et IOTA).
« C'est la première fois qu'une image avec un tel niveau de précision a été obtenue sur une étoile jeune entourée d'un disque. Ce disque pourrait nous aider à comprendre comment notre propre système solaire s'est formé il y a 4,5 milliards d'années », s'enthousiasme Fabien Malbet du LAOG. « Nous sommes impatients d'améliorer encore ces images pour comprendre les mécanismes en jeu quand un système planétaire est en train de se former ».
« Obtenir une image de cette étoile nous a vraiment poussé à atteindre les limites de ce qui est possible avec la technologie actuelle. C'est une démonstration éclatante de ce qui peut être obtenu quand on combine la puissance des observatoires les plus avancés au monde », conclut Myriam Benisty de l'Observatoire d'Astrophysique de Florence en Italie. « L'interférométrie a finalement réussi à entrer dans le monde des images et le Very Large Telescope Interferometer en fait aujourd'hui totalement partie ».
http://www.insu.cnrs.fr/co/ama09/images-de-la-zone-de-formation-des-planetes-autour-d-une-jeune-etoile