Salut
Une mutation sur un seul gène permet à certaines personnes de ne jamais faire l’expérience de la douleur physique au cours de leur vie, ont découvert des chercheurs en étudiant quelques cas très rares au Pakistan. Cette condition, a priori enviable, est en réalité dangereuse, comme en témoigne l’histoire du jeune garçon de Lahore qui a attiré l’attention du Dr Geoffrey Woods. Célèbre comme un phénomène de foire dans cette ville du Nord du Pakistan, l’adolescent était capable de marcher sur des braises ou de s’enfoncer des couteaux dans les bras sans broncher. Il est mort après avoir sauté d’un toit.
Synonyme d’inconfort et de déplaisir, la douleur est un mécanisme essentiel à la survie : elle permet de connaître les limites de son organisme et oblige à se soigner en cas de blessure. Le Dr Woods (University of Cambridge, GB) et ses collègues ont retrouvé au Pakistan trois familles du même clan que le jeune garçon parmi lesquelles six personnes n’avaient jamais ressenti la douleur, alors qu’elles étaient sensibles au chaud, au froid et aux sensations habituelles.
Tous sont porteurs de la même mutation sur le gène SCN9A, ont découvert les chercheurs, qui publient leurs travaux aujourd’hui dans la revue Nature. Ce gène permet la fabrication d’une protéine, un canal sodique, qui permet aux ions sodium de traverser les membranes des cellules -un mécanisme indispensable à la transmission des signaux nerveux liés à la douleur, depuis les terminaisons nerveuses jusqu’au cerveau. La mutation du gène empêche le canal de fonctionner.
Etonnamment, cette mutation ne semble pas affecter d’autres fonctions de l’organisme, soulignent les chercheurs. Les six personnes étudiées au Pakistan sont par ailleurs totalement normales et ne souffrent d’aucun problème neurologique, d’aucune maladie si ce n’est de blessures non soignées.
Une étude récente a montré qu’une autre mutation du gène SCN9A était à l’origine de douleurs anormalement fortes chez certains patients. Ce gène devient donc une cible très intéressante pour mettre au point de nouveaux traitements contre la douleur. Si l’inactivation du canal sodique n’entraîne pas d’autres effets, il pourrait être bloqué pour stopper la douleur dans des cas extrêmes ou pour une anesthésie. Il ne s’agit pas de faire disparaître la douleur. Elle est vitale.
source http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/sciences/