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Nourrir les oiseaux en hiver peut avoir des conséquences sur l’évolution des espèces que n’imaginent sans doute pas ceux qui font ce geste bien intentionné. Une nouvelle étude sur un petit oiseau migrateur européen, la fauvette à tête noire, confirme que la nourriture offerte dans les jardins britanniques est en train de séparer une population de fauvettes en deux.
Les fauvettes à tête noire (Sylvia atricapilla) qui se reproduisent en Allemagne et en Autriche migrent vers le sud pendant l’hiver, en Espagne et au Portugal. Cependant une partie de ces oiseaux migrent en Grande-Bretagne depuis les années 60: cette route est en effet plus courte pour les fauvettes d’Europe Centrale qui ont bénéficié de la nourriture disposée par la main de l’homme et qui ont donc survécu au froid de l’hiver britannique.
De précédents travaux ont montré que ces deux routes migratoires sont en train de séparer deux groupes d’oiseaux, ceux qui migrent en Grande-Bretagne étant de retour plus tôt, ils ont tendance à se reproduire entre eux.
L’équipe de Martin Schaefer, de l’Université de Fribourg (Allemagne), a comparé les gènes des deux groupes de fauvettes, qui passent la belle saison dans les mêmes forêts allemandes. Malgré cette proximité, la séparation entre les deux groupes selon la destination de la migration est très nette, expliquent Schaefer et ses collègues dans la revue Current Biology. Il ne s’agit pas encore de deux espèces mais de deux écotypes, autrement dit deux groupes qui ont développé des traits distincts adaptés à des habitats différents.
Les fauvettes qui passent l’hiver en Grande-Bretagne ont le bec plus pointu, pratique pour picorer la nourriture fournie, et les ailes plus rondes, ce qui est plus commode pour manœuvrer. En revanche les fauvettes qui migrent en Espagne ont les ailes plus allongées, mieux adaptées aux vols longs, et le bec plus large pour consommer des fruits, notamment des olives.
Selon Martin Schaefer, il n’est pas certain que ces deux écotypes finiront pas donner deux espèces. Pour cela il faudrait que le comportement des humains demeure stable pendant encore plusieurs décennies. En revanche cela illustre l’impact des actions humaines sur l’évolution du monde vivant.
source http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/sciences/vivant/20091207.OBS9874/oiseaux_la_main_qui_nourrit_modifie_les_especes.html